Le Boudoir
Edito par Maria de Morais, datant
du 23 novembre 2007, pour l'inauguration
du Boudoir de la Galerie Pixi
Héraclite prétendait qu’on ne se baigne pas dans le même fleuve puisque l’eau de chaque fleuve se renouvelle inlassablement depuis la source. En ce qui me concerne, je vois la Galerie Pixi comme un fleuve qui suivrait son cours sur son élan naturel. Comme chaque fleuve, elle a aussi ses humeurs, ses méandres, ses remous et ses jaillissements que certains clarifieront d’imprévisibles voire de capricieux. Sans perdre la moindre parcelle d’identité dans un monde où tout bouge, conciliant les bons et les mauvais jours, je dirait que Marie Victoire Poliakoff rend ce cours aussi peu routinier que possible.
La Galerie Pixi a donc changée quelque peu.
Depuis quelques semaines, le 95 rue de Seine est devenu « Le Boudoir de Marie Victoire Poliakoff ».
« Pourquoi j’aime tant ce mot qui évoque la discrétion, le mystère et l’élégance ? Ne tenait qu’aux définitions, je ne saurais laquelle choisir. Un salon féminin ? Un salon de conversation ? Un espace à soi ? Un endroit où l’on se retire. Certes mon boudoir est un lieu qui appelle à la bouderie. A la bouderie d’un certains monde … Dans un sens, cette porte que l’on pousse et que l’on referme sur soi en ouvre une autre. Elle s’ouvre sur mon être intérieur. Elle s’ouvre sur tout ce que j’aime : l’Art, la Beauté, l’Elégance, la Fantaisie, l’Amitié … Oui, l’Amitié pourquoi pas ?
Je crois aux belles rencontres … »
L’oeil du visiteur qui pénètre dans le lieu pour la première fois est ainsi attiré par une écriture graphique. D’emblée le ton est donné. Porte noire en bois laqué, rideaux blancs en coton épais, mobilier noir ou blanc. Il y souffle un certain air « Chapeau-melon, bottes de cuir ». Une mise en scène de l’Elégance, affirmée par la géométrie de la tente napoléonienne noir et blanche.
Le lieu ne déçoit pas avec ses confrontations inattendues et très personnelles.
Une vitrine le long du mur fête la légèreté. À l'intérieur, mouvements de soie. Robes noirs signées Allegra Hicks. Robes en couleurs allègrement flottantes d’Adeline André. En vison, animées de tons forts et contrastés, les écharpes rayées de Marie Victoire Poliakoff voisinent avec des bijoux et des minéraux dont le quartz et ses troublantes propriétés. Une boîte, cadeau surprise pour les enfants, un coussin brodé Menteur pour un homme. Et puis des peintures.
Au sol, sculptures. Bernard Cousinier, Rupert Mair. Des socles blancs accueillent l'art sacré de Muriel Engelhart, sculptures silencieuses en plâtre. Entre eux, les œuvres de Martin Mc Nulty explosent en couleurs et matières.
Le dialogue n'est pas neutre.
Et pour continuer ce dialogue avec talent et panache, des rencontres autour des artistes de la galerie suivront. Question de transmettre la passion. Entre installations et accrochages, exposition à thèmes, carte blanche ou expositions de groupe, promouvoir leur travail occupera une place importante dans cette nouvelle vie. À la suite de certaines expositions, des catalogues verront le jour. Certaines œuvres seront éditées, mais à un dixième de la taille réelle. L’univers de la miniature a toujours séduit Pixi. Selon l'humeur, des soirées s'organiseront, harmonieuses et poétiques, autour de musiciens et écrivains, invités à venir partager leurs émotions. Pour ces soirées privées, le Boudoir se transformera en salon. Pour accéder aux ondoiements du salon musical est à la poésie du salon littéraire, une clé sera nécessaire. Cette clef existe, elle est en bronze et ciselée par Alexis Poliakoff.
Et pour tous, et tout aussi piquants y seront les jeudis soirs, tous les jeudis soirs.
Des rencontres improbables, des coïncidences merveilleuses, des rendez-vous enchanteurs. L'irremplaçable Fantaisie en sera l'artisan. Avec les mêmes et pas toujours les mêmes, avec ceux de passage ou ceux de fidélité, elles sont à suivre, comme un feuilleton de semaine en semaine, de saison en saison. Et ce boudoir aux belles références restera ouvert à toutes les fêtes impromptues. L’existence prend alors son aspect chatoyant … Et l'on se plaît à imaginer les femmes invitant leurs amants.
« Mon boudoir, n'est-il pas une échappée belle ? »
À entendre Marie Victoire Poliakoff, le bonheur se pose là où on ne l'attend pas.
Restons dans son sillage.
LE BOUDOIR DE MARIE VICTOIRE POLIAKOFF
dans Maison Française
Décembre - Janvier 2008/2009
par Isabelle Girard
Photos © Alexandre Bailhache